Avec le soutien de la FICD et de Nouvelle Planète, l’ONG péruvienne Acaté Amazon Conservation vient de produire quatre nouveaux manuels de lecture richement illustrés en langue matses et en espagnol, sur les connaissances écologiques des Indiens Matses. Ce peuple vit dans une région difficile d’accès de l’Amazonie péruvienne, et la plupart d’entre eux ne parlent que leur langue indigène. Et jusqu’à récemment, cette dernière n’existait pas sous forme écrite.

Période concernée : 2020

Lieu : Vallée Galvez, Province du Loreto, Pérou

Partenaire local : Acate – une ONG de défense du peuple matses

Bénéficiaires : la population totale du peuple matses, environ 2’300 personnes.

Membre FICD :

Association dont la représentation jurassienne est basée à Porrentruy. Nouvelle Planète est une organisation suisse à but non lucratif créée en 1986, neutre sur les plans confessionnel et politique.

Depuis plusieurs années déjà, Acaté forme de jeunes auteurs matses à interviewer des anciens de la tribu à propos de leurs connaissances de la forêt, puis à transcrire leurs propos, et à les mettre en page. Pour la mise en image, un artiste matses fournit des dessins et des aquarelles originaux. Les quatre nouveaux volumes concernent l’histoire naturelle des reptiles, un survol de tous les animaux du territoire matses, un autre survol des plantes locales, et un abécédaire en langue matses « pour apprendre à lire à la maison ».

Le résultat de ce travail laisse bouche-bée. Alors qu’on pense regarder un manuel de lecture pour indigènes amazoniens, on se retrouve devant des centaines d’images colorées d’une beauté exquise et d’une précision impressionnante. Comme si Linné, le père suédois de la classification des espèces, était revenu parmi nous, avec les couleurs et la diversité tropicales en plus.

La qualité du travail est telle qu’une personne se rendant en pays matses ferait bien de regarder les dessins des nombreuses espèces de serpents qui y vivent, de façon à pouvoir les reconnaître ; et elle gagnerait aussi à lire ce que les anciens matses disent à propos de ces animaux : certains serpents ne sortent que la nuit, d’autres vivent dans des trous dont, parfois, ils ne font ressortir que leur tête, et d’autres encore vous mordent en s’enroulant autour de votre jambe, ou alors, ne vous attaquent que s’ils sont à jeun. Dans ce milieu, une personne avertie en vaut deux.

Par ailleurs, les lecteurs intéressés par la faune amazonienne et capables de lire l’espagnol seront sûrement intéressés de connaître la tortue ashna charapa, qui a une grosse tête, mais qui sent si mauvais que les Matses ne la mangent pas. Ou le gecko salamanca, que les Matses accueillent volontiers sous leurs toits, parce qu’il mange toutes les blattes et les araignées qu’il rencontre. Ou le caméléon coloré, qui s’enfuit lorsqu’on l’approche, mais qui attaque et mord lorsqu’il a une portée à défendre.

En tout, ces quatre volumes présentent quelque mille dessins et aquarelles originaux. Au vu de leur qualité, il serait possible d’en faire une exposition, qui montrerait la diversité éblouissante de la forêt amazonienne, la connaissance détaillée du milieu d’un peuple indigène, et la beauté électrisante de la vie sur terre


Texte : Jeremy Narby ● Nouvelle Planète