Au début du mois juin, dans le cadre du projet « Pédagogie Professionnelle au Cameroun (PEPROCAM) », une délégation de six enseignants de l’Université des Montagnes, sise à Bangangté au Cameroun, a voyagé en Suisse, et plus particulièrement dans le canton du Jura, à la découverte du système de formation duale suisse. Ils ont notamment visité la Fondation rurale interjurassienne (FRI), membre de la Fédération interjurassienne de coopération et de développement (FICD). Ce projet implique également une collaboration avec l’Institut agricole d’Obala, partenaire de la FRI.

Le système de formation duale, qui fait la fierté de la Suisse, inspire les responsables pédagogiques chargés de la formation professionnelle jusqu’en Afrique. Dans le Jura, nous connaissons l’Institut agricole d’Obala (IAO) un établissement de formation professionnelle dans le domaine de l’agriculture, qui s’est développé notamment grâce au soutien, durant plus de vingt ans, du canton du Jura. Ce projet continue à bénéficier de financements jurassiens, mais également bernois, à travers la FICD.

Le projet « Pédagogie Professionnelle au Cameroun (PEPROCAM) » est également un projet lié à la formation professionnelle. Il est soutenu par la FICD et porté par l’Association suisse de soutien à l’Université des Montagnes (ASS-UDM), basée à Delémont. Ce projet a pour objectif de développer la formation à la pédagogie professionnelle des enseignants camerounais des centres de formation professionnelle. Il s’agit de former les « enseignants débutants » à la conception, à l’animation et à l’évaluation d’une séquence d’enseignement.

Une alliance inédite entre trois organisations liées de la FICD

Au départ, le problème des initiateurs du projet PEPROCAM était de trouver des formateurs. « On trouve des apprentis, mais pas d’enseignants assez outillés au niveau pédagogique », souligne Charly Yafong, membre de l’ASS-UDM. Favoriser les synergies entre ses membres et s’assurer de la qualité de leurs projets fait partie intégrante des missions de la FICD. C’est pourquoi elle a naturellement fait le lien entre ce projet et celui de l’IAO. Ainsi, 22 camerounais ont entamé cette formation sous la houlette de la Haute école fédérale en formation professionnelle. Au cours de leurs cursus, les enseignants de l’Université des Montagnes ont participé à une formation pédagogique à l’IAO, au Cameroun. Pour six d’entre eux, ce premier échange Sud-Sud a ensuite été complété, en début juin, par une visite, en Suisse, de différents établissements de formation professionnelle, notamment la Fondation rurale interjurasienne et le Centre jurassien d’enseignement et de formation (CEJEF).


À Courtemelon, siège jurassien de la FRI, la délégation a ainsi découvert la collection de cultures agricoles présentée par Beat Knobel, un des enseignants de l’institution. Ce dernier revient sur les spécificités d’un tel enseignement : « Ici, agriculteurs et apprentis viennent faire des exercices; il est en effet important que la théorie ne soit pas déconnectée de la pratique. »

Les enseignants camerounais ont été enchantés de leur visite. Ils ont notamment retenu la bienveillance existant entre les formateurs et les apprentis : « Une approche très humaine de la formation, c’est ce que nous raconterons à notre retour », commente Emmanuel Chiangong, l’un des protagonistes de ce voyage. Charly Yafong, quant à lui, relève « L’importance de vivre de l’intérieur ce système et surtout la possibilité d’assurer la transférabilité et l’autonomisation de la formation à plus long terme. »

L’énorme potentiel de la formation professionnelle en Afrique

Josué Simon Louokdom est chargé de cours à l’Université des Montagnes. Au cours de sa visite, il estime avoir reçu toutes les informations nécessaires sur le système dual : « C’est vraiment un chemin à prendre pour la formation professionnelle. Actuellement, nos propositions ne prennent pas encore en compte cette dimension. »

L’IAO s’est déjà engagé depuis de nombreuses années dans cette voie. L’Université des Montagnes, et plusieurs autres partenaires Sud des associations membres de la FICD, prennent également le chemin de la formation duale. Directeur de la FRI, président de la FICD, expert en formation professionnelle et connaisseur de cette partie du globe, Olivier Girardin estime que ” la formation professionnelle en Afrique a un immense potentiel ». Et de conclure, « Ici, elle ouvre de formidables perspectives pour la jeunesse camerounaise. »

Nul doute que les initiatives d’échanges croisés entre le Nord et le Sud, ainsi qu’entre les pays du Sud, constituent l’avenir de la coopération au développement. Elles permettent en effet que chaque partie soit gagnante et que l’ensemble des jeunes de la planète soient mieux formés et plus ouverts aux enjeux liés à la paix, à la sécurité alimentaire, à l’éducation ou à la santé, auxquels ils auront à faire face à l’avenir.


Bruce Rennes ● Chargé de projets