La crise sanitaire que nous ne finissons pas de traverser aura montré, comme d’autres crises auparavant, ce dont les humains sont capables : courage et engagement altruistes, mais aussi réflexes d’égoïsme et rejet panique de l’autre. Pour s’en sortir, il nous faudra peut-être faire nôtre la maxime selon laquelle une personne ne peut être en sécurité que si toutes les autres le sont aussi.

Membre FICD :

Amnesty International, groupe Jura - Jura bernois. Organisation de défense des droits humains, elle agit par des campagnes de presse, le lancement de pétitions, la rédaction de lettres de soutien à des victimes d’injustice et de persécution, etc.

Presque mécaniquement la crise sanitaire s’accompagne, dans de nombreux pays, d’un affaiblissement des droits humains. »

La pandémie actuelle constitue, on le sait, une double peine pour les plus faibles, chez nous bien sûr, et de manière plus préoccupante encore dans les pays émergents. Si la maladie peut toucher tout le monde sans discernement, les mesures de confinement partiel ou total que les gouvernements ont instaurées en Europe pour endiguer le virus ont entraîné des conséquences souvent très graves pour les plus vulnérables : chômage, précarisation, détérioration du lien social, violence domestique, etc. Certes, les pays riches engagent (à crédit) des moyens colossaux pour maintenir le système en état de fonctionnement. Mais dans les pays en développement où une grande majorité des gens exercent leur activité dans le secteur informel, sans retraite, sans assurance-chômage, sans assurance-maladie, et avec le tarissement de l’argent envoyé par la diaspora, la situation est bien plus tragique, et potentiellement explosive.

Pas de remise de dettes

Et les mécanismes de solidarité patinent. En juillet 2020, les pays du G20 décident… de ne rien décider quant à un moratoire de deux ans sur la dette du Tiers-Monde qui aurait permis aux Etats les plus pauvres d’investir dans la riposte sanitaire plutôt que dans le service de la dette. Mais le virus n’a pas de frontières, et il faudrait agir au plan mondial. À cela s’ajoute que ce sont ces mêmes pays pauvres qui sont le plus durement touchés par les effets du dérèglement climatique. Triple peine. Car au moment où on aurait dû prendre des mesures concrètes à la mesure des enjeux climatiques, les Etats riches choisissent de dépanner à coup de milliards le trafic aérien et, souvent, la vieille économie carbonée.

Le regard d’Amnesty International

Presque mécaniquement la crise sanitaire s’accompagne, dans de nombreux pays, d’un affaiblissement des droits humains. Pressions sur les journalistes qui documentent l’impéritie de certains gouvernements ; pressions sur le personnel soignant mal payé et mal protégé (à ce jour plus de 7’000 professionnel·le·s de la santé sont mort·e·s du Covid-19) ; mise au pas des lanceur·euse·s d’alerte ; paupérisation ; conditions de détention inhumaines dans des prisons surpeuplées qui deviennent des foyers infectieux ; suppression de facto du droit de réunion et de manifestation ; dangers liés au traçage informatique des citoyens, etc. Amnesty International poursuit son travail d’enquête, d’information et de lobbying pour rendre publiques les graves violations de tous les droits humains, en particulier celles liées à la pandémie, et pour inviter les gouvernements au respect de ces droits que leurs Etats, pour la plupart, reconnaissent dans leur constitution.


Hubert Godat ● Amnesty International Jura-Jura bernois