À la question de savoir quelle est la plus grave menace qui pèse sur l’avenir de l’humanité, Boutros Boutros-Ghali, alors Secrétaire général des Nations Unies, répondait : « Le déséquilibre entre les pays riches et les autres. On pourrait ajouter, encore plus simplement, le déséquilibre entre pauvres et riches, qui détruit tout tissu social et nie toute solidarité. Car c’est la misère qui alimente les fanatismes et le terrorisme, et suscite les immenses migrations à travers le monde » (Boutros Boutros-Ghali cité par Holzer, B. Les leçons de la solidarité, éditions du Centurion, Paris, 1994, p.6).

Il y a d’autres jeunes qui sont, soit résignés, soit remontés face au monde globalisé qui consacre tant d’inégalités et d’injustice ! »

Aujourd’hui, en effet, les jeunes entendent plus parler de terrorisme, d’immigration, de misère des pays du Sud que des causes à la base de toutes ces situations. On ne leur dit pas pourquoi tant d’enfants meurent de faim dans des pays aux nombreuses richesses du sol et du sous-sol ; pourquoi tant de guerres laissent dans la rue autant d’orphelin·ne·s ! Par exemple, la Ville de Kinshasa (en RDC) compte plus d’un million d’enfants de la rue. Pourquoi tant de gens sur les routes de l’exode ? Pourquoi tant de cruauté à l’est de la RDC, en Ukraine, en Israël, en Palestine, … ?

Une des causes fondamentales de cette situation est l’inégalité ou encore l’injustice dans l’organisation des échanges commerciaux internationaux. Les produits du Sud, qu’ils soient du sol ou du sous-sol, sont bradés pour satisfaire la demande du Nord. Le manque d’équité est criant. Mais, le monde se tait.

Les jeunes n’aiment pas ce silence

Les jeunes du Sud en général, et ceux de la RDC en particulier, n’aiment pas ce silence ! Depuis la nuit des temps, qui dit jeunesse dit promesse de vie, et qui dit promesse de vie, dit ambition, projection dans le temps, l’avenir ou le rêve. Les jeunes sont souvent considéré·e·s comme des rêveur·euse·s ! Mais ceux·celles-là vivent sans perspective. L’espoir leur est enlevé. Dans ce contexte, plusieurs d’entre eux·elles refusent de se résigner et se mettent à remuer ciel et terre pour rejoindre des ailleurs qui leur promettent monts et merveilles !

Pour avoir rencontré beaucoup de jeunes dans ma carrière d’enseignant, il me semble qu’il y a aujourd’hui deux catégories principales de jeunes dans ce monde internationalisé. Ces groupes sont caractérisés par deux contextes antagonistes : une certaine jeunesse occidentale nourrie par des théories extrémistes de divers bords et une réalité migratoire inquiétante. Cette jeunesse craint de perdre ses acquis et d’hypothéquer son avenir en laissant venir chez elle des jeunes étranger·ère·s qui viendraient profiter de ses pains et perturber son quotidien. Ces jeunes ont tout et n’ont rien à chercher ailleurs. Ils vivent dans le confort, mais ignorent que ce dernier est assuré grâce aux biens et produits pris de force ou à vil prix dans les pays du Sud, souvent saignés à l’insu de leurs habitant·e·s qui vivent dans une grande pauvreté.



Les jeunes qui n’y croient plus

L’autre groupe est celui des jeunes Africain·e·s qui, de plus en plus conscient·e·s du déséquilibre de ce monde globalisé, refusent de se résigner à survivre, mais cherchent à vivre ou mieux vivre ! Pour cela, ils·elles se battent pour aller là où il y a une promesse de vie plus confortable ou plus digne. Ces jeunes-là croient qu’il n’y a rien chez eux. Ils rêvent de plus en plus d’un mieux-être au-delà de leurs frontières ! Ils·elles croient même que non seulement l’Afrique n’apporte rien au monde, mais qu’elle n’a rien à donner ! Ils·elles vont même jusqu’à penser que l’Afrique ne vit que par la générosité des pays européens. Comme pour enfoncer le clou, les pays occidentaux exhibent et ritualisent de façon ostentatoire leurs soi-disant dons à l’Afrique avec un dédain visible de la dignité de l’homme africain et de la femme africaine.

Aux côtés de ces deux groupes, il y a d’autres jeunes qui sont, soit résigné·e·s, soit remonté·e·s face au monde globalisé qui consacre tant d’inégalités et d’injustice !

Dans ce contexte, le travail que Congo.Ju réalise en RDC consiste à payer les études des jeunes. Il permet non seulement de les scolariser, mais aussi de les éduquer et de les former à un métier. Les jeunes filles sont souvent victimes de discriminations dans l’éducation. Les familles choisissent souvent de scolariser les garçons ! Congo.Ju privilégie le soutien aux jeunes filles. Depuis sa création, l’association a permis la scolarisation de plus de 200 jeunes dont 70% de filles ! Parmi nos parrainé·e·s, il y en a aujourd’hui plusieurs qui ont trouvé un travail comme informaticien·ne·s, infirmier·ère·s, médecins, journalistes, enseignant·e·s, prêtre,…

Comme on peut le voir, il existe beaucoup de moyens pour aider les jeunes du Sud à vivre dans leur pays et de leurs propres ressources. Pour nous, un des moyens, peut-être le plus important pour y arriver, c’est l’éducation des jeunes générations. Eduquer la jeunesse, c’est éduquer toute la nation. L’enseignement permet un changement de la perception d’eux·elles-mêmes et des habitudes de consommation de ces jeunes. Congo.Ju investit dans la formation et engage même certain·e·s de ses parrainé·e·s dans ses divers projets en RDC. Certain·e·s de nos parrainé·e·s qui ont fait des études infirmières ou de médecine sont engagé·e·s, aujourd’hui, dans notre centre hospitalier ou dans d’autres activités. Former et donner de l’emploi si c’est possible, c’est ouvrir de nouveaux horizons pour les jeunes dans leur pays !

Cela leur permet de bien vivre chez eux sans rêver d’un ailleurs lointain et hypothétique.


Abbé Jean-Pierre Ndianyama ● Congo.Ju