Au Zanskar, à 3600 mètres d’altitude, l’association Rigzen-Zanskar a mis au point une technique de construction de bâtiments à faible empreinte énergétique, tant du point de vue de son chauffage que des matériaux utilisés. Un projet qui doit permettre de promouvoir auprès de la population locale une architecture durable et innovante, valorisant les techniques de construction et le savoir-faire local, tout en réduisant la dépendance aux ressources non renouvelables.

Une alliance gagnante puisque le béton n’est utilisé que pour quelques structures porteuses, ce qui permet de réduire de plus de 80 % l’utilisation du ciment qui, lui, est un matériau importé

Temple au Zanskar. ©Rigzen-Zanskar


Membre FICD


L'association Rigzen-Zanskar

L’association Rigzen-Zanskar est basée à Porrentruy, engagée depuis 1998 au
Zanskar, haute vallée de l’Himalaya indien. Parmi ses projets phares : éducation, prévention et santé, préservation du patrimoine et de la culture locale, soutien
au développement de l’agriculture et du maintien du cheptel, développement de techniques de développement durable, efficience énergétique, bâtiments, formation
professionnelle et formation continue. RIGZEN-ZANSKAR soutien notamment La Marpaling Lamdon Model School, une école ouverte en 2000 et qui compte aujourd’hui plus de 250 élèves de 4 à 15 ans.


Contact :

Monsieur François Roquier
Rue des Deutes 23
2720 Tramelan
www.rigzen-zanskar.org - info@rigzen-zanskar.org

Ce projet - soutenu à hauteur de 20’000 francs par la FICD - est un bâtiment destiné à accueillir les enseignants et les membres de l’équipe administrative de la Marpaling Lamdon Model School. Il est réalisé sous la forme d’un projet pilote, afin que les Zanskarpas puissent s’en inspirer en tant qu’exemple à reproduire, en alternative à l’utilisation du béton et du chauffage à gaz, qui prolifèrent depuis quelques années dans la région, avec l’amélioration des voies d’accès. Du point de vue des initiants, un non-sens, tant économique qu’écologique.

Heureux hasard, en 2013, Éric Domont et Salomé Genzoni, tous deux étudiants à l’EPFL, réalisent un travail conjoint en architecture et génie civil. Connaissant l’association Rigzen-Zanskar, ils s’intéressent de près aux projets de construction durable. Un voyage en 2013 leur permet d’affiner leur connaissance du contexte local et, in fine, de présenter le résultat de leurs recherches en 2014. Le projet reprend les grandes lignes de l’architecture traditionnelle locale, de manière à ne pas être confronté à une rupture architecturale.

Une alliance gagnante puisque le béton n’est utilisé que pour quelques structures porteuses, ce qui permet de réduire de plus de 80 % l’utilisation du ciment qui, lui, est un matériau importé.

Fin 2014, Eric présente le projet lors d’une journée de réflexion animée par Christian Simm, bénévole de l’association, et l’idée de réaliser un projet « grandeur nature » germe dans les esprits. Les défis pour cette réalisation sont nombreux. Du point de vue du chauffage, notamment. Les maisons traditionnelles du Zanskar sont conçues pour être chauffées l’hiver par les animaux. Mais en une ou deux décennies, la vocation paysanne des Zanskarpas a largement diminué. Le projet devait donc être ciblé sur des villageois qui ne sont plus forcément des paysans. Le second défi consiste en la valorisation des matériaux locaux plutôt qu’importés.

Utilisation de matériaux locaux

En 2015, sous la houlette d’Éric, le projet prend forme, avec l’aide bénévole d’architectes lausannois et le soutien de l’Institut de génie civil de l’EPFL. La construction démarre en 2016 sous la surveillance de Rigzen, responsable de l’association au Zanskar, et de Grégoire Aguettant, étudiant qui a travaillé au dimensionnement du bâtiment à l’EPFL. Elle allie le pisé pour le mur principal intérieur et les briques d’adobe pour les murs extérieurs, deux méthodes qui utilisent essentiellement des matériaux locaux : argile, sable, gravier et eau. Une alliance gagnante puisque le béton n’est utilisé que pour quelques structures porteuses, ce qui permet de réduire de plus de 80 % l’utilisation du ciment qui, lui, est un matériau importé, particulièrement gourmand en énergie.

L’isolation est faite à partir de milliers de bouteilles en PET collectées par les élèves de l’école, ce qui a aussi pour effet de les sensibiliser à la gestion des déchets.

Un autre aspect du projet consiste en une utilisation rationnelle et optimale d’un chauffage passif. Des étudiants de l’EPFL ont dimensionné l’inclinaison et l’orientation d’une serre pour optimiser l’accumulation de la chaleur dans les murs durant l’hiver et offrir une aération salutaire l’été.

Investissement à long terme vs instant présent

De la théorie à la pratique, le pas est parfois immense. Une telle construction nécessite un investissement de départ et un degré d’innovation supérieurs aux constructions traditionnelles ou en béton. Un des enjeux est de montrer qu’il serait souvent plus judicieux d’investir une bonne fois dans l’isolation d’un bâtiment, plutôt que d’acheter régulièrement du gaz quand on a quelques sous, à des Zanskarpas qui vivent dans l’instant présent et qui ont vécu au cours des deux dernières décennies une évolution phénoménale de leur environnement.

Et c’est là qu’interviendra Christian Simm l’été prochain. Il axera son action sur la façon de communiquer avec les villageois, de manière à promouvoir le projet, afin qu’il s’essaime sur d’autres constructions. Une démarche encouragée par des résultats prometteurs. En effet, lors des journées d’information des parents d’élèves de la Marpaling Lamdon Model School, ces derniers ont montré de l’intérêt pour cette construction d’un nouveau genre. Les questions pertinentes posées lors de ces rencontres démontrent que les Zanskarpas ont parfaitement compris les enjeux des bâtiments durables .


Bruce Rennes (FICD) et François Roquier ● Rigzen-Zanskar ● www.rigzen-zanskar.org.