Créée lors de l'Assemblée constitutive du 27 juin 1994, La Fédération interjurassienne de coopération et de développement (FICD) célèbre cette année son 25e anniversaire.  La FICD n’évolue pas seule, bien au contraire. Elle appartient à un contexte régional, national et international mouvant qui influence ses activités et celles de ses membres. Ainsi, l’histoire de la FICD s’est confondue avec de nombreuses conférences internationales et surtout deux plans d’envergure : les Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) et l’Agenda 2030.

Les objectifs à atteindre varient d’un pays à l’autre. Concernant l’ODD n°6 : « Garantir l’accès de tous à l’eau et à l’assainissement et assurer une gestion durable des ressources en eau », par exemple :

  • La Suisse assure la préservation des ressources en eaux souterraines pour garantir durablement la qualité de l’eau potable.
  • Le Burkina Faso réalise des milliers de forages d’eau.

Durant les années soixante, à la fin de la période coloniale, le développement est devenu un thème important du plan d’action des Nations Unies. En effet, durant cette décennie, pas moins de 42 nouveaux pays ont été admis dans l’organisation, pour la très grande majorité en provenance du continent africain. Le magazine Chronique ONU de décembre 2007 (Vol. XLIV No. 4 2007), qui retrace l’histoire de 40 ans de développement, souligne que « la question la plus urgente fut alors de réduire la faim dans le monde. » C’est le début de 40 ans de rencontres et de conférences visant à renforcer les partenariats entre les pays et à augmenter l’aide au développement, ceci afin de répondre aux nombreux besoins urgents des populations les plus fragiles.

Plus tard, dans les années nonante, malgré les efforts consentis pendant plus de trente ans pour résoudre les problématiques du développement, de nombreuses menaces ont surgit et contrecarré toutes ces bonnes intentions. La lutte contre la faim et la pauvreté, ainsi que la défense des droits humains, par exemple, se sont violemment heurtées aux conflits armés dans de nombreuses régions du monde, aux changements politiques en Europe de l’Est ou encore à l’accélération du changement climatique partout sur la planète.

En 1994, date de la fondation de la FICD, les états membres des Nations Unies se sont réunis au Caire (Egypte) à l’occasion de la Conférence internationale sur la population et le développement. Cette conférence faisait suite au Sommet de la Terre de Rio et son objectif était de consolider les principes du développement durable grâce à un consensus signé par les 179 pays représentés. Le programme d’action adopté ce jour-là est fondé sur l’interdépendance de la population et du développement, l’émancipation des femmes et la nécessité de satisfaire les besoins de chaque individu plutôt que de réaliser des objectifs démographiques. Il pose les bases d’un texte adopté en juin 1997 : « l’Agenda pour le développement », un document global soulignant que le développement est une entreprise multidimensionnelle qui vise à améliorer la vie de tous les peuples, comprenant tous les différents aspects et éléments du développement : la paix, la croissance économique, la protection de l’environnement, la justice sociale et la démocratie.

Ces textes furent les prémices des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD), une démarche ambitieuse qui prenait en compte huit thèmes prioritaires, dont la réduction de la pauvreté et de la faim, l’amélioration de l’éducation primaire et la promotion de l’égalité des sexes. Ces objectifs ne concernaient que des défis à relever par les pays du Sud.

Les objectifs du millénaire : quels résultats ?

Pour reprendre quelques-uns des huit thèmes des OMD, on peut constater que l’extrême pauvreté a effectivement diminué de façon significative au cours des deux dernières décennies. En 1990, près de la moitié de la population des pays en développement vivait avec moins de 1,25 dollar par jour ; cette proportion est tombée à 14 % en 2015. Sur le plan mondial, le nombre de personnes vivant dans une extrême pauvreté a diminué de plus de moitié, passant de 1,9 milliard en 1990 à 836 millions en 2015.

Dans les régions en développement, le taux net de scolarisation dans l’enseignement primaire a atteint 91 % en 2015, contre 83 % en 2000. Le nombre d’enfants non scolarisés en âge de fréquenter l’école primaire a été réduit quasiment de moitié dans le monde, passant de 100 millions en 2000 à environ 57 millions en 2015. Parmi toutes les régions, l’Afrique subsaharienne a obtenu les meilleurs résultats en ce qui concerne l’éducation primaire depuis que les OMD ont été mis en place. Le taux d’alphabétisation des jeunes de 15 à 24 ans a augmenté dans le monde, passant de 83 % à 91 % entre 1990 et 2015. L’écart entre les femmes et les hommes s’est réduit.

Aujourd’hui, les femmes représentent 41 % des travailleurs rémunérés non agricoles, en augmentation par rapport aux 35 % de 1990. Entre 1991 et 2015, la proportion de femmes dans l’emploi précaire par rapport à l’emploi total des femmes a diminué de 13 points.

Le nombre de décès d’enfants de moins de cinq ans a diminué, passant de 12,7 millions en 1990 à près de 6 millions en 2015 dans le monde. Depuis le début des années nonante, le taux de réduction de la mortalité des moins de cinq ans a plus que triplé dans le monde.

Au vu des résultats décrits ci-dessus, et selon la plupart des observateurs, les OMD ont exercé une influence significative sur de nombreux critères de développement humain : politique des pays en voie de développement, soutien des pays riches, amélioration de l’accès à la scolarité ou aux services d’hygiène. Toutefois, et malgré ces avancées, les progrès ont été inégaux entre les régions et les pays, donnant lieu à des écarts importants. Des millions de personnes ont été laissées de côté, principalement les plus pauvres et celles désavantagées à cause de leur sexe, âge, handicap, ethnicité ou lieu d’habitation. Ainsi, au terme des OMD, il reste près de 800 millions de personnes qui vivent encore dans une extrême pauvreté et qui souffrent de la faim ; plus de 160 millions d’enfants de moins de cinq ans ont une taille inadaptée à leur âge à cause d’une alimentation insuffisante ; 57 millions d’enfants en âge de fréquenter l’école primaire ne sont pas scolarisés ; près de la moitié de la population active dans le monde travaille encore dans des conditions précaires, bénéficiant rarement des prestations associées à un travail décent. Au terme de l’échéance que s’étaient donnée les pays de l’ONU pour la réalisation de OMD, de nombreux défis restent à réaliser durant les années post-2015 !

Les objectifs de développement durable

Depuis 2015, l’Agenda 2030 réunit les efforts nationaux et internationaux visant à trouver des solutions communes aux grands défis que sont la consommation des ressources ou le changement climatique. Il est essentiellement constitué des 17 Objectifs de développement durable (ODD). Cet Agenda concerne désormais l’ensemble des pays de l’ONU et non plus seulement les pays du Sud. C’est l’occasion pour chaque pays, et donc également pour la Suisse, de réaliser sa propre introspection afin d’atteindre les objectifs qu’il se sera fixés. Dans la pratique, chacun effectue un état des lieux complet en regard des 17 objectifs à atteindre. Une fois la démarche effectuée, les gouvernements fixent des mesures afin d’atteindre ces objectifs personnalisés (voir encadré page précédente).

En Suisse, le Conseil Fédéral accorde une grande importance à l’Agenda 2030. En effet, il s’est doté d’une structure administrative fédérale afin d’ancrer la Confédération dans ce programme. C’est donc tout naturellement, par la nature de leurs activités, que la FICD, ses fédérations sœurs et l’ensemble de leurs membres, participent activement à la promotion des Objectifs de développement durable.

La Confédération renforce la mise en œuvre de l’Agenda 2030, mais…

Après que, l’été dernier, le mandat de Michael Gerber, envoyé spécial pour le développement durable, n’ait pas été prolongé, le Conseil Fédéral a décidé, le 14 décembre 2018, que les questions relatives à l’Agenda 2030 seraient confiées à deux délégués, chargés de la direction opérationnelle des travaux de mise en œuvre. Lors de sa séance du 22 mars 2019, il a nommé M. Daniel Dubas (41 ans), du Département fédéral de l’environnement, des transports, de l’énergie et de la communication (DETEC), et M. Jacques Ducrest (52 ans), du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE), délégués du Conseil fédéral à l’Agenda 2030. Ils poursuivront les travaux entrepris jusque-là.

Un premier bilan des résultats obtenus par la Confédération a été présenté à l’ONU en 2018 sous la forme d’un rapport national. Il démontre que la Suisse est déjà très avancée dans de nombreux domaines. Toutefois, plus critique, la société civile veille, notamment « La Plateforme Agenda 2030 » qui réunit une quarantaine d’organisations issues de la société civile et actives dans les domaines du développement, de l’environnement, de la paix, des droits humains, de la santé, de l’économie durable et des syndicats. Il est reproché à la Confédération la publication d’un rapport trop succinct et qu’«aucune analyse sérieuse n’est faite des actions à entreprendre pour améliorer la mise en œuvre du cadre global du développement durable en Suisse. »

Ainsi, parallèlement aux résultats de la Confédération, l’organisation a publié son propre rapport, comprenant 11 recommandations, telles que : « Ne laisser personne de côté, respecter les limites planétaires, les droits humains ou renforcer l’ancrage institutionnel. »

Comme le relève Eva Schmassmann, présidente de La Plateforme Agenda 2030 : « Afin de mettre en œuvre l’Agenda 2030 et les Objectifs de développement durable, les délégués et le comité de gestion doivent disposer des ressources et des compétences nécessaires. Leur rôle doit aller au-delà de la coordination des mesures adoptées et des rapports à établir. Ainsi, ils ne doivent en aucun cas se contenter d’un consensus minimal entre les offices fédéraux, mais travailler de manière ambitieuse à une meilleure cohérence des politiques en faveur du développement durable. »

De son côté, comme elle le fait depuis 25 ans, la Fédération interjurassienne de coopération et de développement poursuit des collaborations intensives de manière à échanger des informations transparentes, aussi bien avec ses partenaires qu’avec ses membres. Elle contribue ainsi à la bonne mise en œuvre de l’Agenda 2030, tant en Suisse qu’à l’étranger, à travers les projets qu’elle soutient.


Bruce Rennes ● FICD ● ficd.ch