Michael Gerber a été désigné pour occuper la fonction de Représentant spécial pour le développement durable global en automne 2012. Son rôle est de représenter la Suisse vers l’extérieur pour toutes les questions concernant l’Agenda 2030 de développement durable. Jusqu’en automne 2015, il a conduit les délégations suisses dans le cadre des négociations interétatiques menées à l’ONU sur l’Agenda 2030, ainsi que sur son financement (Programme d’Action d’Addis Abeba).

« la façon dont nous vivons, gérons notre ménage et consommons a souvent des effets indésirables dans d’autres parties du monde»

Interview


Michael Gerber


La Suisse est-elle une tête du pont dans la mise en œuvre des objectifs de développement durable ? De quelle manière s’implique-t-elle dans cette mise en œuvre ?

Oui, je dirais que la Suisse est une tête de pont importante, en comparaison internationale, dans le cadre des ODD. Néanmoins, il y a aussi en Suisse certains défis à relever pour les atteindre. Cela a également été confirmé par un sondage exhaustif mené au niveau fédéral en 2017. Bien que nous, en Suisse, soyons bien avancés dans de nombreux domaines des ODD, la façon dont nous vivons, gérons notre ménage et consommons a souvent des effets indésirables dans d’autres parties du monde, si nous prenons en compte, par exemple, les ressources naturelles utilisées pour la production des biens que nous importons.

Y-a-t-il un agenda précis pour atteindre les objectifs 2030, quelles sont les étapes intermédiaires ?

Le Conseil fédéral décidera ce printemps quelles mesures supplémentaires la Suisse prendra pour mettre en œuvre les ODD et comment nous nous organiserons au niveau fédéral afin d’apporter la meilleure contribution possible à la réalisation des ODD. La Suisse présentera son premier rapport intermédiaire complet sur la mise en œuvre de l’Agenda 2030 aux Nations-Unis en été 2018. C’est sur cette base que la Stratégie de développement durable du Conseil fédéral pour la prochaine législature (2020-2023) sera ensuite élaborée.

De quelle manière peut-on mieux communiquer les objectifs de développement durable auprès des petites ONG qui interviennent dans la coopération et le développement ?

Il est important de comprendre que les ODD affectent tout le monde. L’État n’est pas le seul responsable dans leur mise en œuvre. Les ONG jouent un rôle clé car elles s’engagent à répondre à des préoccupations qui sont, en général, compatibles avec celles de l’Agenda 2030 et ses ODD. La coopération internationale doit s’orienter vers l’Agenda 2030 et chercher à apporter des contributions concrètes pour soutenir les ODD dans les pays en développement. Ces contributions doivent aussi être mesurées et démontrées, entre autres, par les ONG. Cependant, l’orientation des ONG vers les ODD s’accompagne également d’un changement de paradigme, puisque chacun est appelé à penser et à agir de manière intégrée ainsi qu’à travailler de plus en plus de manière intersectorielle et avec de nouveaux partenaires (en particulier du secteur privé et de la communauté scientifique).


Propos recueillis par Bruce Rennes ● FICD ● www.ficd.ch

L’AGENDA 2030 DE DEVELOPPEMENT
DURABLE : QU'EST-CE ET QUI EST CONCERNE ?

Le 25 septembre 2015, les 193 États membres de l’ONU ont adopté l’Agenda 2030 de développement durable. Cet agenda sert de cadre aux efforts déployés conjointement aux niveaux national et international pour relever les grands défis de la planète, comme l’extrême pauvreté, les changements climatiques, la destruction de l’environnement et les crises sanitaires. Il intègre également des aspects liés à la paix, à l’Etat de droit et à la gouvernance, qui revêtent une importance fondamentale pour le développement durable.

L’Agenda 2030 s’applique à tous les pays, du Nord comme du Sud, et fixe les lignes directrices et les priorités internationales applicables d’ici à 2030 en matière de développement durable. Les 17 objectifs de développement durable (ODD) et leurs 169 cibles (sous-objectifs) forment la clé de voûte de l’Agenda 2030. Ils tiennent compte équitablement de la dimension économique, sociale et environnementale du développement durable et intègrent, pour la première fois, l’éradication de la pauvreté et le développement durable dans un dispositif commun.

La Suisse est, elle aussi, appelée à réaliser ces objectifs sur le plan national et international. L’État n’est toutefois pas le seul responsable dans leur mise en œuvre. Tout le monde doit participer à l’implémentation de l’Agenda 2030, afin de pouvoir garantir sa réalisation : le secteur privé, la communauté scientifique, la politique et la société civile, représentée, entre autres, par les ONG. Celles-ci jouent un rôle clé, car elles s’engagent à répondre à des préoccupations qui sont en général compatibles avec celles de l’Agenda 2030 et ses ODD. Cependant, l’orientation des ONG vers les ODD s’accompagne également d’un changement de paradigme, puisque chacun est appelé à penser et à agir de manière intégrée, ainsi qu’à travailler de plus en plus de manière intersectorielle et avec de nouveaux partenaires (en particulier du secteur privé et de la communauté scientifique). Ce changement de paradigme est basé sur la prise de conscience que les défis mondiaux nécessitent des réponses communes et transnationales.

Ainsi, les ONG peuvent et devraient aussi s’engager : en faisant connaître l’Agenda 2030 auprès du public, en alignant leurs projets sur les principes d’universalité et de multi-dimensionnement et/ou en exerçant leur important rôle de plaidoyer en exigeant des gouvernements qu’ils rendent compte de la mise en œuvre de l’Agenda 2030.

Michael Gerber ● Représentant spécial pour le développement durable global ● www.eda.admin.ch/agenda2030

Les ONG jouent un rôle clé, car elles s’engagent à répondre à des préoccupations qui sont en général compatibles avec celles de l’Agenda 2030.

Exposition "#YOU NEED TO KNOW" consacrée aux Objectifs de développement durable. À Delémont.